Nous étions vingt ou trente
Brigands dans une bande,
Tous habillés de blanc
A la mode des, vous m'entendez,
Tous habillés de blanc
A la mode des marchands.
La première volerie
Que je fis dans ma vie,
C'est d'avoir goupillé
La bourse d'un, vous m'entendez,
C'est d'avoir goupillé
La bourse d'un curé.
J'entrai dedans sa chambre,
Mon Dieu, qu'elle était grande,
J'y trouvai mille écus,
Je mis la main, vous m'entendez,
J'y trouvai mille écus,
Je mis la main dessus.
J'entrai dedans une autre
Mon Dieu, qu'elle était haute,
De robes et de manteaux
J'en chargeai trois, vous m'entendez,
De robes et de manteaux
J'en chargeai trois chariots.
Je les portai pour vendre
A la foire de Hollande
J'les vendis bon marché
Ils m'avaient rien, vous m'entendez,
J'les vendis bon marché
Ils m'avaient rien coûté.
Ces messieurs de Grenoble
Avec leurs longues robes
Et leurs bonnets carrés
M'eurent bientôt, vous m'entendez,
Et leurs bonnets carrés
M'eurent bientôt jugé.
Ils m'ont jugé à pendre,
Que c'est dur à entendre
A pendre et étrangler
Sur la place du, vous m'entendez,
A pendre et étrangler
Sur la place du marché.
Monté sur la potence
Je regardai la France
Je vis mes compagnons
A l'ombre d'un, vous m'entendez,
Je vis mes compagnons
A l'ombre d'un buisson.
Compagnons de misère
Allez dire à ma mère
Qu'elle ne m'reverra plus
J' suis un enfant, vous m'entendez,
Qu'elle ne m'reverra plus
J'suis un enfant perdu.
Paroles: Henri Contet. Musique: André Grassi 1946
Où es-tu camarade, où es-tu?
En prison, et le ciel par dessus
Que fais-tu camarade, que fais-tu?
Un corsaire est toujours un pendu!
Tous feux éteints tambour battant
C'est aujourd'hui que l'on me pend
Et voilà ma dernière escale
Je n'irai plus dessus la mer
Mais j'entrerai en mon enfer
En bousculant cent mille étoiles
Ce que j'ai fait? Dieu seul le sait
Je n'étais pas aussi mauvais
Que le bourreau qui va me pendre.
J'aimais chanter oh hisse et haut,
J'aimais aussi mon grand bateau
Qui savait si bien me comprendre.
Où es-tu camarade, où es-tu?
En prison, et le ciel par dessus
Que fais-tu camarade, que fais-tu?
Un corsaire est toujours un pendu!
J'en ai passé des nuits d'amour
Chacun pour soi, chacun son tour,
Nous fallait bien notre pitance
Mais pas un cœur ne va pleurer
Quand je serai mort et enterré
Tout seul au pied de ma potence.
Le vent de mer nous a trahis,
Nous a fait voir de beaux pays,
Et puis voilà où nous en sommes!
Le vent de mer est un menteur,
Les braves gens n'ont pas de cœur
Et le corsaire est un pauvre homme
Où es-tu camarade, où es-tu?
En prison, et le ciel par dessus
Que fais-tu camarade, que fais-tu?
Un corsaire est toujours un pendu!
Paroles: H. Delattre et Antoine Queyriaux. Musique: Adelmar Sablon
Quoi, monsieur l'curé, faudrait que j' vous dise
Si j' crois au Bon Dieu? Vous vous moquez d' moi!
Si j' viens d' temps en temps dans votre vieille église
C'est qu' vous la chauffez et qu' dehors, j'ai froid.
Mais comme cependant vous m' semblez brave homme,
J' viens vous faire tout d' même un brin d' confession.
J' suis qu'un va-nu-pieds, une pauvre bête de somme,
Je n'ai qu' l'expérience et pas d'instruction;
Mais j' peux bien vous l' dire en toute liberté,
Ces grands mots qu' partout
On lit à la ronde,
Votre Egalité, votre Fraternité,
Ils sont écrits là pour se foutre du monde!
T'nez, monsieur l' curé, quand j'étais tout mioche,
J' n'ai pas eu d' baisers, mais j'ai r'çu des coups,
On m'en a fichu d' ces sacrées taloches.
Il est vrai qu'mon père n'm'aimait pas beaucoup.
A douze ans, on m' mit en apprentissage,
j' fus l'souffre-douleur d' certains ouvriers.
Alors, un beau jour, je perdis courage
Et j' partis, montrant l'poing à l'atelier.
Quand vous dites qu'il faut aimer son prochain,
Et que j' me souviens de toutes mes misères!
C'est toujours Abel qu'est tué par Caïn!
Ne prêchez donc pas qu' tous les hommes sont frères.
T'nez, monsieur l'curé, à vingt ans à peine,
Je partis soldat, j' croyais être heureux,
Si j' n'eus pas à m' plaindre de mon capitaine,
J' n'en dis pas autant des p'tits galonneux.
Ils m' traitaient d' crétin, d' fainéant, d' sale bourrique.
Y en a qui trouvent ça très intelligent,
Et j'ai ramassé pour cinq ans d'Afrique
Parc' qu'un jour, furieux, j' frappai mon sergent.
J' sais pas si là-haut, c' que dans votre fourbi
Vous app'lez l'Enfer, c'est une chose atroce;
Mais j' vous garantis qu' sortant d' Biribi,
Le mouton l' plus doux d'vient une bête féroce!
T'nez, monsieur l'curé, je n' veux plus rien dire
Parc' que j' sens qu' maintenant, j'irais p't-être trop loin,
Repoussé d' partout, j' termine mon martyre
Jusqu'à c'qu'on m'ramasse crevé dans quéqu' coin.
Y a une Société qui protège les bêtes,
Qui les r'cueille et veille à c'qu'elles n' meurent pas d' faim.
Savez-vous c' qu'en pensent quelques mauvaises têtes?
Qu'on en fasse autant pour le genre humain.
Aimer les quatre-pattes, certainement qu' c'est beau
Et les philanthropes ont raison en somme,
Je n' suis pas jaloux du sort des cabots;
Mais, avant les chiens, faut nourrir les hommes!