7.

Il y a dans tout changement quelque chose d'infâme et d'agréable à la fois, quelque chose qui tient de l'infidélité et du déménagement. Cela suffit à expliquer la révolution française.

V

8.

Mon ivresse en 1848.

De quelle nature était cette ivresse?

Goût de la vengeance. Plaisir naturel de la démolition. Ivresse littéraire; souvenir des lectures.

Le 15 mai. – Toujours le goût de la destruction. Goût légitime si tout ce qui est naturel est légitime.

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Les horreurs de Juin. Folie du peuple et folie de la bourgeoisie. Amour naturel du crime.

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Ma fureur au coup d'État. Combien j'ai essuyé de coups de fusil. Encore un Bonaparte! Quelle honte!

Et cependant tout s'est pacifié. Le Président n'a-t-il pas un droit à invoquer?

Ce qu'est l'Empereur Napoléon III. Ce qu'il vaut. Trouver l'explication de sa

nature, et sa providentialité.

VI

9.

Être un homme utile m'a paru toujours quelque chose de bien hideux.

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1848 ne fut amusant que parce que chacun y faisait des utopies comme des châteaux en Espagne.

1848 ne fut charmant que par l'excès même du Ridicule.

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Robespierre n'est estimable que parce qu'il a fait quelques belles phrases.

10.

La Révolution, par le sacrifice, confirme la superstition.

VII

11.

POLITIQUE

Je n'ai pas de convictions, comme l'entendent les gens de mon siècle, parce que je n'ai pas d'ambition.

Il n'y a pas en moi de base pour une conviction.

Il y a une certaine lâcheté ou plutôt une certaine mollesse chez les honnêtes gens.

Les brigands seuls sont convaincus, – de quoi? – qu'il leur faut réussir. Aussi, ils réussissent.

Pourquoi réussirais-je, puisque je n'ai même pas envie d'essayer?

On peut fonder des empires glorieux sur le crime, et de nobles religions sur l'imposture.

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Cependant, j'ai quelques convictions, dans un sens plus élevé, et qui ne peut pas être compris par les gens de mon temps.

12.

Sentiment de solitude, dès mon enfance. Malgré la famille, – et au milieu des camarades, surtout, – sentiment de destinée éternellement solitaire.

Cependant, goût très vif de la vie et du plaisir.

VIII

13.

Presque toute notre vie est employée à des curiosités niaises. En revanche il y a des choses qui devraient exciter la curiosité des hommes au plus haut degré, et qui, à en juger par leur train de vie ordinaire, ne leur en inspirent aucune.

Où sont nos amis morts?

Pourquoi sommes-nous ici?

Venons-nous de quelque part?

Qu'est-ce que la liberté?

Peut-elle s'accorder avec la loi providentielle?

Le nombre des âmes est-il fini ou infini?

Et le nombre des terres habitables?

Etc., etc.

14.

Les nations n'ont de grands hommes que malgré elles. Donc le grand homme est vainqueur de toute sa nation.

Les religions modernes ridicules

Molière.

Béranger.

Garibaldi.

IX

15.

La croyance au progrès est une doctrine de paresseux, une doctrine de Belges. C'est l'individu qui compte sur ses voisins pour faire sa besogne.

Il ne peut y avoir de progrès (vrai, c'est-à-dire moral) que dans l'individu et par l'individu lui-même.

Mais le monde est fait de gens qui ne peuvent penser qu'en commun, en bandes. Ainsi les Sociétés belges.

Il y a aussi des gens qui ne peuvent s'amuser qu'en troupe. Le vrai héros s'amuse tout seul.

16.

Éternelle supériorité du Dandy.

Qu'est-ce que le Dandy?

X

17.

Mes opinions sur le théâtre. Ce que j'ai toujours trouvé de plus beau dans un théâtre, dans mon enfance et encore maintenant, c'est le lustre, – un bel objet lumineux, cristallin, compliqué, circulaire et symétrique.

Cependant, je ne nie pas absolument la valeur de la littérature dramatique. Seulement, je voudrais que les comédiens fussent montés sur des patins très hauts, portassent des masques plus expressifs que le visage humain, et parlassent à travers des porte-voix; enfin que les rôles de femmes fussent joués par des hommes.

Après tout, le lustre m'a toujours paru l'acteur principal, vu à travers le gros bout ou le petit bout de la lorgnette.

18.

Il faut travailler, sinon par goût, au moins par désespoir, puisque, tout bien vérifié, travailler est moins ennuyeux que s'amuser.


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