Antistrophe II.

Ô daimôn qui as hanté cette demeure et les deux Tantalides, tu as doué les femmes de leur audace sauvage, et tu déchires mon cœur! Et, debout sur ce cadavre, comme un corbeau funèbre, la voilà qui chante son chant de triomphe!

KLYTAIMNESTRA.

Antistrophe III.

Voici que tu parles plus véridiquement en accusant le daimôn trois fois terrible de cette race. C'est lui, en effet, qui excite cette soif du sang dans nos entrailles. Avant qu'une première plaie soit fermée, un nouveau sang jaillit!

LE CHŒUR DES VIEILLARDS.

Strophe IV.

Certes, tu te hâtes de rappeler le daimôn furieux de ces demeures. Hélas! hélas! Maux terribles et fortune lamentable! Ô dieux! hélas! c'est Zeus qui a tout voulu et tout fait. Rien, en effet, n'arrive parmi les hommes sans Zeus. Rien ne nous est envoyé que par les dieux. Hélas! hélas! ô roi, ô roi! comment te pleurerai-je? comment dirai-je combien je t'aimais? Tu gis dans cette toile d'araignée, ayant rendu l'âme par un meurtre impie! Malheur à moi! Te voilà couché sur ce lit d'esclave par un crime plein de ruse, frappé de la hache à deux tranchants!

KLYTAIMNESTRA.

Strophe V.

Tu dis que ce crime est le mien, mais ne dis pas que je suis la femme d'Agamemnôn. Celui qui a pris ma forme? c'est l'antique et inexorable vengeur d'Atreus et de son repas horrible. C'est lui qui a vengé sur cet homme les enfants égorgés.

LE CHŒUR DES VIEILLARDS.

Antistrophe IV.

Qui témoignera que tu es innocente de ce meurtre? Comment? comment? Que le vengeur caché du père vienne à son tour! Le noir Arès s'acharne à verser le sang de votre famille; mais, d'où qu'il vienne, il ne fera qu'ajouter au sang des enfants dévorés! Hélas! hélas! ô roi! ô roi! comment te pleurerai-je? comment dirai-je combien je t'aimais? Tu gis dans cette toile d'araignée, ayant rendu l'âme par un meurtre impie! Malheur à moi! Te voilà couché sur ce lit d'esclave, par un crime plein de ruse, frappé de la hache à deux tranchants!

KLYTAIMNESTRA.

Antistrophe V.

Je ne pense pas qu'il ait reçu une mort indigne de lui. N'a-t-il pas apporté le désespoir dans ces demeures, et ouvertement? Il a odieusement sacrifié la fille que j'avais eue de lui, Iphigénéia tant pleurée. Certes, il est mort justement. Qu'il ne se plaigne pas dans le Hadès! Il a subi la mort sanglante qu'il avait donnée.

LE CHŒUR DES VIEILLARDS.

Strophe VI.

J'hésite, je ne sais plus que penser. Que faire, dans mon angoisse, devant la chute de cette maison? Je tremble au fracas du torrent de sang qui engloutit cette demeure, car ce n'est plus une pluie. Après chaque crime, la Moire aiguise un autre crime pour l'expiation!

PREMIER DEMI-CHŒUR.

Antistrophe VI.

Ô terre, terre! Que ne m'as-tu enfermé, avant que j'aie vu celui-ci couché au fond de la baignoire d'argent! Qui l'ensevelira? qui le pleurera? Oseras-tu le faire, toi qui as égorgé ton mari? Oseras-tu le pleurer? Oseras-tu rendre, malgré elle, ces honneurs à son âme, après un aussi grand crime?

SECOND DEMI-CHŒUR.

Qui chantera les louanges funèbres de cet homme divin? Qui répandra sur lui des larmes sincères?

KLYTAIMNESTRA.

Strophe VII.

Il ne convient pas que tu prennes ce souci. Il est tombé, il est mort par moi. Je l'ensevelirai, non pleuré par les siens. Mais Iphigénéia, sa fille, avec un tendre baiser, viendra, comme il convient, au-devant de son père, sur les bords du rapide fleuve des douleurs, et le serrera dans ses bras.

LE CHŒUR DES VIEILLARDS.

Antistrophe VII.

Outrage pour outrage! Comment sortir de cet enchaînement de crimes? Celui qui tue expie, et le sang paye le sang. Tant que Zeus restera dans la durée, qui aura commis le crime l'expiera. Cela est à jamais ainsi. Qui peut chasser de sa demeure une race légitime? Elle en est inséparable, elle y est indissolublement attachée.

KLYTAIMNESTRA.

En vérité, il en est ainsi. Certes, je jure au daimôn des Pleisthénides que je supporterai cette destinée, bien qu'elle soit lourde. Que ce daimôn sorte donc d'ici, et qu'il aille épouvanter d'autres races par des égorgements mutuels! Il me suffit de la plus petite part de nos richesses, pourvu que je détourne de nos demeures la fureur des égorgements mutuels!

AIGISTHOS .

Ô bienheureuse lumière de ce jour qui m'a apporté la vengeance! Maintenant, je croirai qu'il est des dieux vengeurs qui regardent d'en haut les misères des hommes! Je vois, en effet, cet homme étendu mort dans la robe des Érinnyes, et cela m'est doux, car il a expié les fureurs de son père. Atreus, le roi de cette terre, le père de cet homme, a disputé la puissance à Thyestès, pour le nommer clairement, à mon père qui était son propre frère, et l'a chassé des demeures paternelles. Et le malheureux Thyestès, ayant été rassuré sur sa vie, revint en suppliant à ce foyer, où, mort, il ne devait pas souiller de son sang le sol de la patrie. Et le père de cet homme, l'impie Atreus, cachant la haine sous l'amitié et préparant des viandes comme pour un jour de fête, lui donna à manger la chair de ses enfants! Assis au haut bout, Atreus, joyeux, coupait et partageait les doigts des pieds et des mains. Et voici que Thyestès, prenant ces morceaux qui ne pouvaient être reconnus, mangea un repas fatal, comme tu vois, à la race d'Atreus. Mais, s'étant aperçu du crime abominable, il poussa un gémissement et tomba, vomissant ce meurtre. Et il appela l'inexorable exécration sur les Pélopides, renversant la table et vouant par sa malédiction toute la race des Pleisthénides à la mort. Et c'est pourquoi tu peux voir cet homme égorgé, et c'est moi qui l'ai tué justement. J'étais le troisième enfant de mon malheureux père, et je fus chassé avec lui, tout petit dans mes langes. Devenu homme, la justice m'a ramené, et j'ai tendu des embûches à celui-ci, et, bien qu'absent, j'ai tout mené à fin. Aussi, maintenant, je trouverai la mort belle, puisque je vois cet homme enveloppé dans le filet de la justice!

LE CHŒUR DES VIEILLARDS.

Aigisthos, je ne respecte pas l'insolence dans le crime. Tu dis que tu as tué cet homme, et que, seul, tu as médité ce meurtre lamentable! Certes, j'affirme que ta tête n'échappera point au jugement. Sache-le, tu seras condamné par le peuple à être lapidé.


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